Tu as développé ton business en discutant avec tes prospects et clients via les réseaux sociaux ? Tu utilises les messages « directs » comme si c’était une messagerie confidentielle que seuls ton interlocuteur et toi-même pouvez consulter ?

Comment te dire.

À ce stade, pour la majorité des réseaux sociaux (idem pour les réseaux décentralisés du Fediverse, type Mastodon ou Pixelfed, dont je te parlerai prochainement) la question n’est pas tant « ont-ils le droit de consulter ma messagerie ? » mais plutôt « ont-ils la capacité technique de le faire ? ».

Et la capacité technique, je te le dis tout net, ils l’ont. Tu es chez eux, je te rappelle. Et sauf si on te parle de modalités techniques spécifiques (du genre, chiffrement de bout à bout où la clé de chiffrement est chez toi), tu peux considérer que tout ce que tu écris peut être lu par d’autres personnes.

Voire (dans certains cas), le contenu de tes messages est utilisé pour nourrir un profil de toi (et de tes clients) qui permettra de proposer des publications toujours plus pertinentes pour toi (et de la publicité toujours plus lucrative pour eux.. mais je m’égare).

Du coup, partant de ce constat, que te conseillent tes « petites voix intérieures », tu sais, ces incarnations de nos multicasquettes d’entrepreneur solo, capitaine de notre navire business ?

Ta petite voix intérieure de personne organisée

Annoncer clairement que les demandes professionnelles doivent être envoyées par email et non par message sur la plateforme / le réseau social, c’est le meilleur moyen d’éviter de perdre des opportunités business noyées dans le « bruit » de ta messagerie.

Ça te permet également de centraliser au maximum ta communication. Si tu n’as pas le temps de vérifier tes X messageries de réseaux, checker tes emails (idéalement un email réservé à cela) te prendra moins de temps.

Et ça fait un premier filtre : un prospect sérieux ne verra certainement pas de problème à te contacter par email.

Ta petite voix intérieure de commercial

Si tu as tendance à vouloir aider tout le monde et que tu ne sais jamais quand tu dois/peux commencer à monétiser tes services (parce que « c’est juste une petite question par DM »), le renvoi vers une adresse email professionnelle posera directement un cadre te facilitant la transition.

Petit rappel indirect à la personne intéressée que bien entendu, tu veux l’aider, tu es là pour ça. Mais que si tu veux aider un max de gens, tu dois aussi pouvoir remplir ton frigo. Au minimum.

Et donc, la transition de la conversation anodine à la demande couverte par une prestation rémunérée sera facilitée.

Ta petite voix intérieure de personne éthique

Que se passe-t-il si ton compte se fait hacker ou que tu perds l’accès à ton compte (d’une manière ou d’une autre) ?

Tu ne seras plus en mesure de continuer à suivre tes clients comme tu le souhaites.

Dans le cas où les discussions portent sur des sujets sensibles (santé / santé mentale, par ex), est-ce que tu es certain que tu protèges suffisamment l’intimité de tes clients en discutant via une messagerie de réseau social ?

Surtout si à un moment tu décides de déléguer la gestion de tes réseaux à quelqu’un et que tu te contentes de lui « refiler » tes accès, purement et simplement. Cette personne dont la mission est de gérer tes publications aura accès à tes conversations avec tes clients, qui ne s’attendent probablement pas à ça.

Ta petite voix intérieure de juriste

La dernière dont je te parle, mais celle qui est la plus forte chez moi, étant donné que j’ai été cette petite voix pour mes employeurs du temps où j’étais encore salariée (13 ans, quand même.. ce n’est pas rien).

Est-ce que tu as vérifié (dans la déclaration de confidentialité ou les conditions générales d’utilisation) que le contenu des messages est bien confidentiel / privé ?

Comme je le mentionnais en début d’article, c’est limite une question théorique puisque même si l’entreprise qui gère la plateforme s’engage sur l’honneur à ne pas consulter les messages, si elle en a la capacité technique, tu peux vraiment partir du principe que ça va arriver. Que ce soit par un travailleur inconscient de cette interdiction ou un peu trop curieux, sans parler de personnes malfaisantes qui arriveraient à s’introduire dans le système de cette entreprise.

Concrètement, j’avais tenté de trouver une réponse claire à cette question dans la déclaration de confidentialité d’Instagram. Si tu es curieux (ou masochiste), tu constateras rapidement que celle-ci (en tout cas, en date de publication de cet article) renvoie à un document général pour tous les outils de Meta. L’info la plus proche que j’avais trouvée (après beaucoup trop de recherche) c’était : « si la loi de votre pays nous l’interdit, nous ne le ferons pas ».

Euuh, ok Meta. Tu m’inspires grave la confiance là. En plus c’est moi qui doit aller vérifier la loi de mon pays, après le temps perdu à farfouiller dans ta documentation. C’est hyper serviable. Mais je digresse encore.

Est-ce que le réseau social en question permet une utilisation commerciale de sa plateforme ?

Parce que figure-toi que parfois, une plateforme ou une application qui se veut gratuite n’est en fait gratuite que pour un usage « dans ta sphère privée » et que les usages pour ton business sont payants (licence d’utilisation).

Donc si tu utilises la version gratuite pour tes activités professionnelles, et que l’entreprise s’en rend compte, elle peut considérer que tu es en infraction du contrat entre vous (les conditions générales d’utilisation) et décider de fermer ton compte. Ou pire. Donc globalement, que ce soit pour discuter ou poser d’autres actes du quotidien dans le cadre de ton business, ça vaut le coup de te poser la question du « pourquoi cet outil que je veux utiliser est-il gratuit ? « .

Juste comme ça, en passant. Te prévoir une petite check-liste de choses à vérifier quand tu cherches un nouvel outil/logiciel/prestataire, ça peut être une bonne idée.

Et mon dernier point d’alerte – et pas le moindre :

As-tu vérifié que ton utilisation de la plateforme de cette manière est OK niveau loi sur la protection des données personnelles – RGPD ?

Et oui, lorsque nous vaquons à notre activité professionnelle, nous sommes constamment amenés à devoir utiliser des informations sur nos clients, prospects, travailleurs, etc.

C’est bien normal de pouvoir le faire, tant que nous veillons à respecter les droits des personnes dont nous utilisons les données et que nous agissons dans le cadre fixé par la loi. Il y a des principes à respecter, des choses à faire et d’autres à éviter.

Nous devons entre autres veiller à choisir des outils et des prestataires de service qui nous permettent de respecter nos obligations en la matière.

Et parce qu’un outil n’est pas OK ou NON en soi, c’est toujours ce que tu en fais qui est important.

Donc. Même si une tripotée d’influenceurs te disent que c’est tellement bien de discuter avec tes clients de leur problème en messagerie direct sur Instagram (disons, comme ça, innocemment), je t’invite à prendre note de leurs arguments, les mettre gentiment de côté et commencer ta propre analyse.

Et spoiler : Bizarrement, le critère de la conformité au RGPD (où l’objectif, c’est quand même aussi de protéger tes clients, hein..) est rarement abordé dans ces articles « les 10 outils indispensables qui ont sauvé mon business ». Et oui, je les ai lus aussi, pleine d’espoir, ces fameux articles.

Entrepreneur solo ici, tout ça. 😉

Ma conclusion : Oublie les messageries de réseaux sociaux pour discuter avec tes clients et renvoie-les le plus vite possible vers un email sécurisé (vade retro adresse de type gmail).

C’est pour ton bien, pour leur bien. Pourquoi se priver ?

N’hésite pas à leur expliquer pourquoi tu fais ça.

Pas pour les embêter, pas pour leur gratter leur adresse email (que tu n’utiliseras d’ailleurs pas à autre chose que communiquer avec eux, tant qu’ils n’ont pas validé ce fameux autre chose en tout cas.. même si le consentement n’est pas la seule base légale pour justifier l’utilisation des données, mais je m’égare définitivement, désolée.. ). Pour respecter leurs droits et tes obligations.

De mon côté, par rapport à cette thématique des outils, j’ai commencé à explorer les logiciels libres. Un tout nouveau monde qui s’ouvre à moi et qui pourrait être une bonne piste pour résoudre pas mal de mes problèmes.

Et qui sait, peut-être qu’un jour, je pourrais te proposer ce fameux article, en mode « outils RGPD plus friendly ». Parce que la conformité à 100%, ça n’existe pas.. à nous de faire de notre mieux et de veiller à nous améliorer en continu, petit à petit.

BONUS – Avec ou sans GAFAM ?

Sans !

Je te mets déjà quelques outils et applications que j’utilise, pas forcément des logiciels libres mais dans tous les cas des alternatives à envisager pour sortir un peu des sentiers battus si tu es un gros consommateur de GAFAM (mais à toi d’évaluer selon tes besoins) :

• Pixelfed (en parallèle d’Instagram, et probablement un jour prochain, à la place de)
• Mastodon (au lieu de Twitter/X, chez qui je n’étais pas très à l’aise, de toute façon)
• Mailfence (messagerie gratuite belge)
• Framaform (au lieu de Google form)
• Framadate (au lieu de Doodle)
• Libre Office (au lieu du Office de Windows)
• Kmeet d’Infomaniak (au lieu de Zoom, Teams & compagnie)
• Kdrive d’Infomaniak (pour du stockage dans le cloud)
• Olvid et Signal (au lieu de Whatsapp, Messenger, etc)

Et, euuh, voilà. Y’en a 10 en fait. 😀

Bientôt plus. Peut-être même un véritable article à part.

La « Dégafamisation », c’est comme la conformité au RGPD, c’est un voyage. 🙂

Salut, moi c’est Mel’,

Juriste passionnée tombée dans la marmite du RGPD il y a maintenant 6 ans.
Depuis, j’ai compris qu’à côté des aspects légaux « administratif-punitif » pour nous avec notre casquette d’entrepreneur/travailleur, il y avait des enjeux très concrets pour les vraies gens.
Nos clients, nos collègues.
Nos proches.
Nous.
La société, même.

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